Congrès de l'EHA : Des tendances et des progrès

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L’EHA, le congrès européen d’hématologie, a eu lieu à Francfort en Allemagne du 8 au 11 juin 2023. S’il n’y a pas eu durant ce congrès d’annonces spectaculaires, des informations néanmoins intéressantes ont été rapportées, notamment pour le traitement de la LLC. Compte rendu des principales informations à retenir.

Deux tendances, qui concernent les lymphomes, la leucémie lymphoïde chronique et la maladie de Waldenström, sont à noter à l’issue du congrès de l’EHA. Tout d’abord, beaucoup de travaux sont en cours sur la mesure de la maladie résiduelle détectable (ou MRD). Cela consiste à rechercher et comptabiliser les cellules cancéreuses dans le sang, même quand elles sont présentes en très faible nombre. Cette mesure pourrait permettre de remplacer les scanners à répétition – dont on sait qu’ils exposent à des radiations – pour évaluer la réponse aux traitements.
Ensuite, on constate que les données de qualité de vie commencent à être mieux intégrées dans le design des essais cliniques. Ces données sur la qualité de vie sont importantes pour évaluer le bénéfice global d’un médicament pour les patients. Elles sont de plus en plus demandées par les agences en charge de l’évaluation des médicaments avant leur autorisation de mise sur le marché. On peut noter à l’EHA que certains laboratoires pharmaceutiques commencent à les intégrer systématiquement dans leurs essais.
LES NOUVEAUTÉS POUR LA LLC
L’essai clinique « CLL14 » du groupe de recherche allemand a été mis à jour avec des donnés de suivi à 6 ans. Cet essai avait pour but d’évaluer l’efficacité d’une combinaison de deux médicaments : l’inhibiteur de BCL2 vénétoclax (Venclyxto®) et l’anticorps monoclonal obinutuzumab (Gazyvaro®). La durée médiane de survie sans progression est supérieure à 76 mois après l’initiation du traitement. Ces données confirment que cette combinaison a toute sa place comme option de traitement de première ligne de la LLC. Elle a d’ailleurs été très récemment intégrée dans les recommandations de traitement du FILO, le groupe de recherche français sur les leucémies.
Une autre mise à jour a concerné l’essai clinique « Vision » des Pays-Bas, qui évalue l’efficacité de la combinaison du vénétoclax avec l’inhibiteur de BKT ibrutinib pour les patients en rechute. Cet essai montre que la moitié des patients avaient toujours une maladie résiduelle non détectable après 24 mois.
Beaucoup de recherches sont par ailleurs en cours pour trouver une réponse aux trois questions clés qui restent à résoudre pour les patients atteints d’une LLC :
1. Comment surmonter le déficit immunitaire des patients LLC, déficit qui peut être à l’origine de complications graves, et même de décès, à la suite d’infections ? De nouvelles recherches s’intéressent au macro-environnement des cellules cancéreuses de la LLC, c’est-à-dire aux cellules qui entourent les cellules malades.
2. Comment éviter ou retarder le plus possible la double résistance aux deux grandes classes de traitements actuels, les inhibiteurs de BTK (tels que l’ibrutinib ou l’acalabrutinib) et les inhibiteurs de BCL2 (tels que le vénétoclax), ou bien comment contourner ces résistances avec de nouvelles classes de traitements ? Les essais cliniques en cours manquent encore de recul, mais ils devraient bientôt apporter des réponses afin de déterminer si la meilleure stratégie est d’administrer les deux types d’inhibiteurs de manière séquentielle (par exemple un inhibiteur de BTK, puis au moment de la rechute un inhibiteur de BCL2 tel que le vénétoclax) ou de les prescrire en combinaison en première ligne de traitement, en espérant une rémission plus profonde et plus longue.
Une autre approche pourrait venir des cellules CAR-T, même si jusqu’à présent elles semblent moins efficaces contre la LLC que contre les lymphomes. Un essai récent a montré un taux de réponse complète de 18 % pour des patients double réfractaires, un résultat encourageant.
Enfin, des recherches portent sur les anticorps bispécifiques. Ces anticorps sont en mesure de rapprocher une cellule immunitaire à une cellule cancéreuse afin que la première détruise la seconde. L’efficacité de cette nouvelle classe de traitement contre la LLC reste à prouver, ce que de nouveaux essais cliniques récemment lancés cherchent à faire.
3. Comment prendre en charge les patients atteints du syndrome de Richter, une complication rare – mais redoutée – de la LLC qui survient lorsque la maladie se transforme en lymphome aigu ? Peu de traitements efficaces existent à ce jour contre ce syndrome. Un essai clinique italien donne de l’espoir. Cet essai a évalué l’association du vénétoclax et de deux anticorps monoclonaux, l’atezolizumab et l’obinutuzumab.
Une réponse a été obtenue pour 67 % des patients, avec une durée médiane de réponse de 26 mois.